Avant de partir de l’Egypte pour le Canada, mes amis m’ont organisé une fête d’adieux au quartier El-Hussein. C’était moi qui avais choisi le lieu. C’était le Ramadan, et je voulais emmener cet esprit égyptien avec moi. Après avoir pris notre iftar et bu notre café, je cherchais follement une lanterne (Fanous Ramadan); je répétais «Je veux une lanterne égyptienne». Mes amis m’ont convaincu qu’il était tard, et qu’il n’y avait pas de lanternes dans la région. Malheureusement, je n’ai pas eu le temps de l’acheter; mais j’avais, heureusement, déjà acheté deux housses de coussin faites de khayameya que j’ai emportées, plus tard, au Canada. Je ne les ai pas utilisées là-bas, mais de temps en temps, j’ouvrais le tiroir pour les caresser; et je le fermais ensuite en lançant un long soupir.
En m’installant à Gatineau (ville dans la province du Québec et près d’Ottawa), j’ai cherché sur Internet la mosquée la plus proche. Je m’y suis déplacée. Architecturalement, elle ne ressemblait pas aux mosquées traditionnelles. Elle avait un air bizarre. Mais les prêches étaient excellents. L’imam les disait en trois langues: le français, l’anglais et l’arabe. Des professeurs d’université étaient aussi invités à intervenir. La première fois où je suis allée à cette mosquée, j’ai trouvé une brochure qui invitait les fidèles à un iftar au centre communautaire qui se trouve aux environs. J’ai trouvé que c’était une bonne occasion de faire connaissance des arabo-musulmans de la ville canadienne.
Avant même l’heure de l’iftar, je suis arrivée à l’endroit indiqué. J’ai apporté avec moi une Pasta Frolla, que j’ai achetée bien sûr, car je suis une terrible cuisinière. J’ai été choquéede voir la salle divisée en deux: un espace avec des tables réservées aux femmes etun autre pour les hommes. C’était un buffet ouvert. Il y avait aussi un buffet pour les femmes et un autre pour les hommes. Ceci, je le comprends, pour que les femmes et leshommes ne se poussent pas pour avoir leur plat. Mais ce que je ne comprends pas pourquoi deux conjoints doivent chacun se mettre dans une place loin de l’autre.
Cependant, j’ai aimé l’ambiance. Il y avait du couscous et du harira (genre de soupe typiquement marocaine). Le couscous me rappelait mon enfance en Tunisie. Quant au harira, je le connaissais déjà aussi. Mon père avait amené de son voyage au Maroc des paquets préfabriqués de cette soupe, avec le contenu en poudre; mais celle-là était plus délicieuse, car faite à la maison. J’ai fait connaissance de jolies filles marocaines portant leurs djellabas magnifiques. Parmi elles, il y avait Hoda, celle qui allait m’accompagner tout au long de mon séjour au Canada. Toutes les femmes arabes que j’ai croisées, par hasard, dans la rue, je les ai retrouvées durant cette soirée. J’ai senti que je n’étais pas seule, qu’une partie de mon pays, de son esprit et de mon enfance était déplacée ici. A suivre…